dimanche, 23 mars, 2025

Lettre ouverte à Mme la Présidente de l’Association ADEMA, Mme Sy Kadiatou Sow : « Laissez ceux-là dans la contestation et revenez à l’image connue de vous de la malienne et africaine ! »

Lettre ouverte à Mme la Présidente de l’Association ADEMA, Mme Sy Kadiatou Sow 

Mme la présidente ;

Le Mali tout entier vous connait pour votre combat politique, l’Afrique toute entière vous a sans doute connue aussi pour votre combat politique, probablement depuis étudiante. Un combat politique dont une étape a été l’instauration de la démocratie au Mali et le multipartisme. Cette ouverture démocratique a donné l’occasion de la création de l’ADEMA association, dont vous êtes aujourd’hui la présidente, qui perdure encore aujourd’hui, avec l’existence du parti politique ADEMA Parti Africain pour la Solidarité et la Justice (PASJ).

Mme la présidente, le parti ADEMA PASJ a géré le Mali pendant 10 ans, avec le Président Alpha Oumar Konaré comme Président de la République, Chef de l’Etat, Commandant en chef des forces armées. Vous n’êtes pas sans savoir que la déstabilisation du Mali par la rébellion dite « touareg » de 1990 a énormément fragilisé le Mali et ses institutions et que les élections de 1992 n’ont eu lieu que grâce à la signature du pacte de 1992, qui portait en son sein le germe de la partition du Mali. Si les négociateurs maliens ont refusé le terme « Azawad » dans le corps du pacte pour l’appellation sibylline « des régions nord du Mali », le signataire du pacte, côté rébellion, était le Coordinateur des Mouvements et Fronts Unifiés de l’Azawad, monsieur Zahabi Ould Sidi Mohamed. Cela ne voulait rien dire d’autre, que le pacte, en fait avait consacré l’appellation Azawad, et cela, sans le consentement de la majorité des populations du septentrion malien. Parce que le nord du Mali n’est pas que touareg !

L’histoire nous apprend que le pacte a été signé, entre autres choses pour permettre à l’élection présidentielle de se tenir. En effet, Mme la présidente, le pacte a été signé le 11 avril1992, et le premier tour de l’élection présidentielle a eu lieu le dimanche 12 avril 1992 (second tour 26 avril). En clair, il n’y avait pas d’élection au Mali, sans la signature du pacte national et tous les signataires, après, étaient des militants du parti ADEMA PASJ ou proches de celui-ci. Cela en dit long sur la nature des négociations, dont vous étiez certainement partie prenante ou au moins à la 1re loge. Le pacte national s’est avéré être après, une pause stratégique pour permettre à certains caciques et irréductibles de la rébellion de mieux s’armer, de nouer de solides contacts internationaux, de se faire un budget conséquent à la faveur de toutes sortes de trafics dans le septentrion malien, d’intégrer le commandement militaire des FAMA, et les hautes sphères de la gestion publique. Par contre, nombreux sont ceux-là, qui par amour de la patrie, ont fait de ce pacte, un véritable instrument de la paix. Malheureusement, ce qui devait arriver, arriva en janvier 2012. Une rébellion mieux préparée, en intelligence avec la France, les terro-djihadistes et le système des Nations Unies pour la partition définitive du Mali. A cet effet, c’est le « spécialiste maison » de la scission des pays africains, Bert Koenders qui est envoyé au Mali, en qualité de Représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). « Spécialiste maison », parce que  Bert Koenders a de, 2007 à 2010, activement pris part aux initiatives intégrées de soutien à la paix en Afghanistan, au Burundi, en République démocratique du Congo et au Soudan. Après 20 ans de rébellion, la partition du Soudan en deux états distincts et indépendants reconnus par l’ONU, a eu lieu. Partition rondement menée par Bert Koenders. Puis, il s’occupa de la Côte d’Ivoire en 2011 (ONUCI).

Son CV fait état de sa qualité fondateur du Réseau parlementaire sur la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, et de Président de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).  Rien que ça ! Et l’orque la dimension « otanesque » de la crise du Mali est évoquée, il se trouve des « experts » pour appeler au calme, de ne pas céder à l’émotion ou autres thèses complotistes. L’occident est cohérent et fait travailler ses valeureux fils pour sa cause !

Mme la Présidente, à partir de 2012, le pays était à terre, la culture du Mali saccagée (Tombouctou), des atrocités commises sur des hommes et des femmes maliens, des milliers de morts civils et militaires, des enfants privés d’école. Pour parachever la destruction du Mali, le président par intérim, président de l’ADEMA PASJ, fait appel à l’armée coloniale française, en intelligence avec le président français, François Hollande et le Secrétaire général de l’ONU, tous trois socialistes et membres ou ex membre de l’International Socialiste. L’occupation du Mali fut totale, l’armée malienne confinée entre Kayes et Markala (Ségou), pendant que plus de 20 milles soldats étrangers paradent au Mali, avec son cortège de prostitution, de dissémination de drogues et de destruction du tissu socioéconomique en habituant les populations à l’assistance.

Pendant cette période qui a duré près de 10 ans, le pays résonnait du silence assourdissant, des partis politiques et des associations dont la vôtre. Le Mali meurtri, mutilé, humilié, était moins que l’ombre de lui-même. Ce Mali n’a pas mérité ou très peu de l’attention de votre association, la compassion de la combattante que vous êtes, la combattivité, la fougue, l’intransigeance de la passionaria que vous êtes. Le combat, pour sortir le Mali de cette ornière, n’a pas été celui de votre association ou à peine. Effectivement le sage dit : « Il faut avoir de la sagesse et le discernement pour choisir son combat, compte tenu de l’environnement qui prévaut et des rapports de forces en présence ». A Cette époque, avec les terro-djihadistes, la mainmise de la France et de l’OTAN sur le Mali, il ne faisait pas bon revendiquer, tenir des meetings, passer par télé, réseaux sociaux, radios et journaux pour invectiver. Aujourd’hui, c’est possible ! Pourtant, à ces moments difficiles susmentionnés, d’autres associations sont montées au créneau avec des revendications fortes, tant et si bien que des hommes et des femmes, conformément à leurs missions, et défiant une élite politique soumise, désabusée et dépassée, ont pris leurs responsabilités, toutes leurs responsabilités ! Ces hommes, à leur tête, le Colonel Assimi Goita, aujourd’hui général d’armée, ont libéré le Mali, renvoyé à leurs « devoirs » tous les touristes militaires et civils des nations unis et de l’OTAN, éteint les accords d’Alger (descendant direct du pacte de 1992). Aujourd’hui, ils sont encore à la tâche pour finir le « job », celui d’un Mali pleinement souverain, dans une confédération des Etats du Sahel, tout aussi souveraine. Le « job » n’est pas terminé, et voilà que de partout les vuvuzelas claironnent, si ce ne sont les tocsins qui sonnent pour demander de tout arrêter et aller aux élections !

Mme la présidente, tout a été arrêté une fois en 1992 pour aller aux élections, 20 ans après, le pays est tombé encore plus bas. Aujourd’hui, Mme la présidente, le contexte géopolitique a changé, avec de nouvelles menaces contre le Mali, comme l’alliance sans fard entre l’Algérie et les chefs terro-djihadistes. Il faut soutenir la transition et la laisser terminer le « job » pour que le Mali existe, pour de bon.

Mes propos pour le soutien de la transition concernent bien sa vision, pour une Afrique fédérale souveraine, un Mali débarrassé de la françafrique, souverain et digne dans une Confédération des Etats du Sahel, toute aussi débarrassée de la françafrique, souveraine et digne. Voilà la priorité. Chemin faisant, les errances condamnables de gouvernance seront décriées, réprimées et corrigées. Si le Mali est la priorité, écoutons le sage : « ne jetons pas l’eau du bain avec le bébé « , alors, sachons raison gardée et interrogeons nos convictions. Prêtons moins d’attention à notre ego. Le déni de la réalité actuelle (menace existentielle) est porteur de menaces encore plus graves sur le Mali et l’intérêt national bien compris du pays. Si le contexte de ma lettre est compris, il va de soi que je ne manque de respect à personne, à aucun politicien. Surtout pas à vous, Mme la présidente. Je pense que, forcément, il y’a urgence à discuter des priorités au Mali, concomitamment de celles du continent africain pour stopper toute velléité de recolonisation de l’Afrique. Le général français (Le Cointre) n’a pas sourcillé à conseiller à l’Union Européenne, la recolonisation de l’Afrique et aucun pays de cette organisation n’a ni réfuté, ni condamné les propos du Général. L´Union Africaine, non plus d’ailleurs, ni aucun pays africain officiellement. Exactement les mêmes attitudes ont prévalu face à l’arrogance des États-Unis d’Amérique, qui, par décret de son Sénat en avril 2022, s’approprient les ressources stratégiques du sous-sol africain. Voilà, là où sont attendus les hommes politiques et les associations du Mali et de la Confédération des Etats du Sahel. La France n’a pas renoncé à la françafrique, pour preuve, l’augmentation du budget de la DGSE française à plus d’un milliard d’euros pour déstabiliser le sahel.

Mme la présidente, si la reconquête du territoire national s’arrête aujourd’hui, au profit d’une élection qui ne sera ni transparente, ni crédible, ni nationale, avant que les paramètres géopolitiques ne soient totalement maîtrisés, il n’y aura plus de Mali à la prochaine bourrasque ! Alors de grâce, laissez les professionnels de la défense et de la sécurité travailler et profitez de cette occasion pour :

        Prendre toute la mesure de la donne géopolitique mondiale avec l’arrivée de Trump comme président des Etats Unis d’Amérique et le KO asséné à l’Europe qui doit permettre à l’Afrique de s’unir, puisque les européens n’ont plus l’union entre eux comme discours ;

        Développer une vision plus africaine de votre association par quelques actions (i) monter un dossier juridique pour poursuivre les auteurs de la casse de la Libye, dont Nicolas Sarkozy, Bernard Henry Levy, et autres, (ii) prendre à votre compte la plaine du Mali contre la France, aux nations unies, pour appui aux terroristes, (iii) appuyer les autorités de la RDC contre la rébellion du M23, (iv) prendre à votre compte l’appui de l’Ukraine au terro-djihadistes dans le septentrion malien, (v) développer le concept de « pays frontières » que le président Alpha Oumar Konaré et son ministre de l’administration territoriale, Mr Ousmane Sy, n’ont pas eu le temps de développer et de mettre en œuvre ;

       Asseoir plus de civisme dans les cités maliennes !

        Travailler avec les maires dont les ¾ sont du parti ADEMA PASJ pour éviter aux populations des inondations, l’hivernage prochain,

        Parler aux opérateurs économiques maliens, de concert avec l’association des consommateurs du Mali, afin qu’ils aient pitié des maliens et ne pas créer l’inflation juste pour s’enrichir ; cela est condamnable et ce ne sont pas des heures passées à la mosquée qui leur feront éviter l’enfer ;

        Tenir des réflexions sur Confédération des Etats du Sahel et faire des propositions et partager les résultats avec l’opinion nationale ;

        Surtout, s’occuper des familles des martyrs de mars 1991. Le monument aux martyrs et le carré des martyrs à Niaréla, sont certes des symboles forts, mais l’attention constante aux familles des martyrs est mieux. Mme la présidente, votre association, plus que toute autre, doit disposer d’une comptabilité des actions menées envers ces familles. Il est indispensable de renforcer ces actions, plutôt que de vouloir tenter un autre « mars 1991 ». Les maliens voudraient à l’avenir, que tous les hommes et femmes politiques et leaders d’association, comme feue Aissata Cissé, sortent avec les membres de leurs familles dans la rue pour des revendications, si cela devait arriver. Il n’est pas séant de faire tuer les enfants des autres, pendant les siens sont au chaud dans les salons feutrés entrain de surfer sur les réseaux sociaux, ou au-delà des mers, dans des salons douillets, devant des cheminées, suivant à la télé les événements au Mali ;

        Dire au ministre de l’administration territoriale, de faire attention aux dérives communautaristes de plus en plus évidentes et magnifiées par des activités, avec souvent comme symboles des hommes et des femmes d’état, commis aux plus hautes fonctions de la république ;

        Dire au ministre en charge de la Réconciliation nationale, qu’aucune organisation communautariste n’est et ne sera porteuse de paix, et surtout, qu’il faut tirer des enseignements du passé. Si les accords d’Alger sont morts, aune intégration dans l’armée nationale ne saura se faire que par les voies légales. Les DDR et autres terminologies onusiennes sont porteuses de divisions et inappropriées dès lors que d’autres jeunes maliens passent par des concours pour intégrer les postes publics, civils et militaires.

Mme la présidente, à moins d’une auto évaluation publique des actions de votre association, le combat que vous menez aujourd’hui pour un retour à l’ordre constitutionnel n’est ni compréhensible, ni pertinent, sans préjudice de votre illustre parcours politique. Aujourd’hui, la quête d’un ordre constitutionnel qui n’a rien résolu au Mali de la françafrique, est purement insensée ou s’agit-il du cas de l’homme, face au reniement de ses convictions, brutalement mises à l’ordre du jour à partir de mai 2021 ? Ou de cet autre homme, dont l´ego le conduit au déni de la réalité de son pays?

Dans les deux cas, cet homme est embrouillé devant l’échelle des priorités à défendre dans son pays ! Ainsi devra-t-il de l’homme politique de mars 1991 ou des acteurs clés du mouvement démocratique ?

Mme la présidente, je reste persuadé que vous ne correspondez ni à l’un, ni à l’autre. Alors de grâce, Revenez à la priorité qu’est l’existence même du Mali. Les élections viendront quand les professionnels de la défense et de la sécurité l’auront décidées.  Respect et considération à la patriote que vous êtes !

Dieu bénisse le Mali !

Seydou Traoré

Ancien Ministre Mali 2002-2007

Chevalier de l’Ordre National du Mali 2009

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