mardi, 25 mars, 2025

Marché financier international : le Benin préparer l’émission d’un nouveau eurobond de 500 millions de dollars

Le Bénin est sur le point de devenir le premier émetteur africain d’eurobonds d’ici 2025, une démarche qui témoigne de l’ambition croissante du pays sur la scène financière internationale. Ce mercredi 8 janvier, dans une stratégie soigneusement orchestrée, le pays a lancé un roadshow à Londres, une ville emblématique pour les investisseurs, afin de préparer l’émission d’un nouvel eurobond de 500 millions de dollars, qui aura une maturité de 16 ans. Cette opération n’est pas simplement une levée de fonds, mais aussi un signal fort de la confiance du Bénin envers la stabilité économique et la croissance future. Elle s’inscrit dans la continuité des efforts du Bénin pour s’imposer sur les marchés financiers, après des émissions réussies en 2019, 2021 et 2024, qui ont contribué à diversifier ses sources de financement et à renforcer sa crédibilité sur les marchés internationaux.

Ce nouvel eurobond marquera la quatrième opération d’emprunt en eurobonds et le deuxième en dollars pour le pays, consolidant ainsi son statut d’acteur clé sur le marché africain des eurobonds. Les autorités béninoises ont mis en place une stratégie de communication robuste pour séduire les investisseurs, en mettant l’accent sur la croissance soutenue du PIB et les réformes structurelles en cours qui visent à stimuler l’économie locale. Dans le contexte actuel, les prévisions suggèrent que l’émission pourrait être finalisée dès ce vendredi dans le meilleur des scénarios, une perspective qui suscite un grand optimisme parmi les parties prenantes. Cependant, il y a également la possibilité que cette opération soit reportée à la semaine suivante en raison des obsèques de l’ancien président américain Jimmy Carter, qui ont occupé une partie de la semaine aux États-Unis, créant un climat d’incertitude sur les marchés. Quoi qu’il en soit, cette étape marquera un moment déterminant dans le parcours financier du Bénin, renforçant sa présence sur la scène internationale et ouvrant la voie à de futures opportunités d’investissement.

En 2024, une année marquée par un regain d’activité des pays africains sur les marchés financiers internationaux, plusieurs nations, dont la Côte d’Ivoire (2,6 milliards de dollars), le Sénégal (750 millions de dollars), le Bénin (750 millions de dollars), le Cameroun (550 millions de dollars) et le Kenya (1,5 milliard de dollars), ont levé des fonds significatifs sur le marché des eurobonds. Ce retour sur la scène financière mondiale ne se limite pas aux montants levés, mais représente également une affirmation stratégique de la résilience des économies africaines face aux défis tels que l’inflation mondiale et les incertitudes géopolitiques. Pour faciliter ces rencontres avec les investisseurs, des institutions financières de premier plan comme Citigroup, JP Morgan et Société Générale sont chargées d’organiser à la fois des réunions virtuelles et des présentations dynamiques, permettant aux pays d’expliquer leurs visions économiques et d’établir des connexions solides avec les acteurs financiers globaux. « Le Bénin se réengage sur le marché des euro-obligations pour diversifier ses sources de financement. Les conditions de marché sont favorables et l’appétit des investisseurs pour la dette africaine reste fort », note Ousseynou Diagne, cadre chez Société Générale, dans une interview à Bloomberg. Ce dialogue avec les investisseurs témoigne de la volonté des nations africaines de se positionner sur la carte financière internationale, tout en soulignant leur potentiel de croissance.

Ce roadshow à Londres représente une étape cruciale pour Cotonou, qui espère séduire les investisseurs en mettant en avant ses bonnes performances économiques et sa gestion prudente des finances publiques. Lors de l’émission précédente en février 2024, le pays avait levé 750 millions de dollars avec un coupon de 7,96 % et un carnet de commandes atteignant les 5 milliards de dollars, un chiffre qui illustre l’intérêt soutenu des investisseurs envers les opportunités en Afrique de l’Ouest. À présent, selon TradeWeb, ces obligations sont cotées avec un rendement de 8,8 %, légèrement supérieur au rendement initial de 8,375 %. Cela laisse supposer que la prochaine émission pourrait être réalisée à des taux légèrement plus élevés que lors des opérations passées, reflétant à la fois l’évolution des conditions de marché et la dynamique d’une demande en constante évolution pour des produits d’investissement dans une région à fort potentiel de croissance. Une telle situation amène le Bénin à renforcer ses argumentaires économiques, mais aussi à développer un récit captivant autour de ses projets de développement futur, afin de capter l’attention des grands investisseurs internationaux.

Cette hypothèse est confirmée par Mark Bohlund, analyste principal chez REDD Intelligence, qui prédit que le nouvel eurobond du Bénin pourrait offrir un coupon proche de 8 %, en réponse aux attentes des investisseurs dans un paysage financier volatile. Ce pronostic souligne non seulement la direction que pourrait prendre le marché obligataire béninois, mais également la capacité du pays à naviguer à travers des défis économiques mondiaux, y compris l’inflation, les taux d’intérêt en hausse et une incertitude géopolitique croissante. Alors que les investisseurs recherchent des opportunités solides pour protéger leur capital, le Bénin doit jouer habilement ses cartes pour attirer des capitaux tout en respectant les impératifs de gestion de la dette.

Dans un contexte économique mondial rempli d’incertitudes, le Bénin affiche une résilience notable depuis la crise sanitaire, ayant même amélioré plusieurs de ses indicateurs. « En 2020, nous avons enregistré l’un des taux de croissance les plus élevés au monde, atteignant 3,8 %. Depuis 2021, notre croissance est supérieure à 6 %. Pour les trois premiers trimestres de 2024, nous avons réalisé un taux de croissance de 6,7 %, et selon les prévisions du FMI, nous devrions maintenir un taux supérieur à 6 % dans les années à venir », a déclaré Romuald Wadagni, ministre des Finances, lors d’une présentation aux investisseurs.

Avec une population de 14 millions d’habitants, le Bénin est également fier de ses performances fiscales. Suite aux réformes engagées en 2016, notamment la digitalisation des services et la formalisation de l’économie, les recettes fiscales ont bondi, passant de 9,7 % du PIB en 2017 à 13,3 % aujourd’hui, avec l’objectif d’atteindre 15 % d’ici 2028, selon les prévisions du gouvernement de Patrice Talon.

Sur le plan budgétaire, le pays se comporte comme un élève modèle, attisant l’admiration des experts en économie. En 2024, grâce à des efforts maintenus et à une gestion rigoureuse de ses finances publiques, le déficit public a été réduit à 3 % du PIB, respectant même avec une année d’avance les critères de convergence de l’UEMOA. Cette rigueur budgétaire est d’autant plus significative compte tenu de l’augmentation des dépenses en matière de sécurité, face à la montée des attaques terroristes ces dernières années, qui ont mis à l’épreuve la résilience de l’État. Mercredi dernier, dans un incident tragique, le pays a enregistré ses pertes les plus lourdes depuis le début des incursions de groupes armés, soulignant la nécessité d’un équilibre entre le développement économique et la protection des citoyens.

Un autre atout mis en avant auprès des investisseurs est la gestion « prudente » de la dette publique, un aspect crucial pour maintenir la confiance sur les marchés internationaux. À la fin de 2024, celle-ci représente 53,7 % du PIB, un chiffre qui reste bien en deçà de la moyenne régionale, reconnaissant l’efficacité des stratégies d’emprunt mises en place par le gouvernement. « La maturité moyenne de notre dette est de 8,9 ans à la fin de 2024, ce qui nous permet de planifier plus sereinement les dépenses futures. Le taux d’intérêt moyen de notre portefeuille a diminué ces dernières années, s’établissant à environ 3,4 % en décembre 2024, un signe positif de la confiance accrue des créanciers », précise le ministre des Finances. De plus, notre exposition au risque de taux d’intérêt est limitée, car près de 98 % de notre portefeuille est à taux fixe, offrant ainsi une protection contre les fluctuations du marché. Ces facteurs combinés contribuent à renforcer la position du pays en tant que destination d’investissement attrayante dans un contexte régional souvent incertain.

Ces efforts n’ont pas échappé aux agences de notation, qui scrutent de près les progrès économiques des nations. En avril 2024, S&P a rehaussé la note du pays à BB-, une classification qui a été confirmée en octobre 2024, accompagnée d’une perspective révisée de stable à positive. Cette notation favorable a été attribuée non seulement à une croissance économique soutenue, mais également à une gestion budgétaire rigoureuse et à des réformes structurelles efficaces, qui ont contribué à renforcer la confiance des investisseurs dans l’économie béninoise. Les analystes soulignent que cette amélioration des notations est le reflet d’une stratégie cohérente mise en place par le gouvernement, qui s’efforce d’optimiser ses ressources tout en investissant dans des secteurs clés pour le développement national.

En parallèle de cette nouvelle émission, le Bénin propose une offre de rachat pour ses obligations à 4,875 % arrivant à échéance en 2032, pour un montant maximum de 250 millions d’euros. Cette opération, qui est financée par un prêt bancaire, s’inscrit dans une stratégie proactive visant à alléger le poids de la dette et à améliorer son profil financier. En proposant ce rachat, le gouvernement béninois montre une gestion proactive de sa dette, souhaitant renforcer sa flexibilité financière et minimiser les pressions qui pourraient découler de la montée des taux d’intérêt internationaux. L’objectif est de créer un environnement favorable à l’investissement, en montrant aux créanciers potentiels que le pays prend des actions concrètes en faveur de sa durabilité financière.

« Ce n’est pas la première fois que le Bénin se montre ambitieux sur les marchés internationaux », déclare un expert des marchés régionaux installé à Cotonou. Cet expert ajoute que cette initiative s’inscrit dans une tendance plus large, où plusieurs pays africains commencent à transformer leur approche des marchés du capital. Le Bénin, en particulier, se distingue par sa volonté de diversifier ses sources de financement et de développer des projets axés sur des infrastructures durables qui bénéficieront à la population à long terme.

En tant que premier pays de l’UEMOA à respecter à nouveau les critères budgétaires, avec un déficit public maîtrisé, comme le souligne M. Wadagni, le Bénin manifeste clairement ses ambitions. Devenir le premier émetteur africain d’eurobonds en 2025 constituerait une victoire symbolique pour ce pays, désireux de se positionner comme exemple de rigueur et de transparence en Afrique de l’Ouest. En atteignant cet objectif, le Bénin pourrait non seulement renforcer sa stature sur la scène internationale, mais également inspirer d’autres nations de la région à adopter des pratiques de gouvernance similaires. Cette nouvelle émission pourrait ainsi renforcer son image d’émetteur fiable et crédible à l’échelle internationale, ouvrant la voie à de futures opportunités de financement et à une collaboration accrue avec des investisseurs étrangers.

Derrière ce prestige, les fonds collectés auront une destination concrète, assurent les autorités béninoises : financer de vastes projets d’État qui devraient transformer le tissu économique et social du pays. En effet, ces ressources financières ne se limiteront pas seulement à des infrastructures physiques, mais viseront également à renforcer l’accès aux services publics essentiels, tels que la santé et l’éducation. L’objectif est d’accélérer les investissements dans les infrastructures tout en répondant aux besoins sociaux croissants de la population. Dans ce contexte, le président Patrice Talon, en fonction depuis 2016 et dont le second mandat s’achève en 2026, fait face à des critiques sur sa capacité à répondre efficacement à ces défis, surtout concernant les inégalités qui persistent dans le pays. Conscient de l’importance de cette question, il a indiqué qu’une partie significative des fonds serait destinée à des projets de développement durable, notamment les cantines scolaires, qui fournissent des repas chauds et nutritifs à plus de 1,3 million d’enfants dans 80 % des écoles publiques, la majorité étant situées en milieu rural. Cette initiative, qui joue un rôle crucial dans la lutte contre la malnutrition et l’absentéisme scolaire, illustrera l’engagement du gouvernement envers l’éducation et l’avenir des jeunes générations. D’autres initiatives sont également en cours, telles que des programmes de nutrition ciblant les femmes enceintes et les enfants durant leurs 1 000 premiers jours de vie, qui visent à atténuer les inégalités structurelles dans un pays où la pauvreté, bien qu’en recul, reste un enjeu majeur, constaté par la baisse des taux de pauvreté de 38,5 % en 2019 à 36,2 % en 2022. Le succès de ces projets dépendra d’une mise en œuvre efficace et d’un suivi rigoureux, car ils pourraient servir de modèle pour d’autres nations de la région cherchant à améliorer les conditions de vie de leurs citoyens tout en attirant des investissements étrangers.

A.K.

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